Mariant habilement l’humour noir à l’espionnage, l’adaptation de l’œuvre de Mick Herron rassemble deux éminentes figures du cinéma britannique, Gary Oldman et Kristin Scott Thomas. Leur confrontation produit un effet électrisant, faisant de Slow Horses l’une des meilleures productions de la plateforme Apple.
Le purgatoire des agents du MI5
Est-il permis aux espions de commettre des erreurs dans l’exercice de leurs devoirs ? Selon Slow Horses, la réponse est oui et non. Inspirée par les thrillers d’espionnage de Mick Herron, le successeur caustique de John Le Carré, la série donne aux espions qui commettent des faux pas majeurs, comme River Cartwright (Jack Lowden), une seconde chance. Pas n’importe quelle seconde chance toutefois. Ils sont relégués à une division du MI5 connue sous le nom de « Slough House ».
Ils sont contraints à y accomplir des tâches administratives monotones et ineptes, sous la supervision de Jackson Lamb (Gary Oldman), un épouvantail alcoolique qui dort régulièrement au travail en chaussettes trouées. Ses railleries continues envers ses subordonnés ont un seul objectif : les pousser à démissionner de ce goulag professionnel d’où l’on ne s’échappe pas si facilement. Cependant, tout le monde n’est pas prêt à se résigner à ce sort affligeant.
Malgré l’énorme bavure qui obère sa carrière – qui sert d’introduction spectaculaire à la série dans un aéroport –, River est résolu à quitter au plus vite ce « dépotoir » dédié aux has-been pour réintégrer la crème du MI5. Pour y parvenir, il outrepasse ses fonctions et commence à enquêter sur l’enlèvement d’un jeune homme d’origine pakistanaise par un groupe d’extrême droite.
Une comédie irrésistiblement loufoque
C’est dans cette thrilleresque intrigue que Slow Horses montre toute sa splendeur. Tout en développant une dimension politique éclairante sur le Royaume-Uni contemporain, elle sert un humour piquant et flegmatique très britannique, courtoisie du scénariste Will Smith (sans rapport avec l’acteur américain), qui a fait ses armes sur Veep, d’HBO, une comédie politique maintes fois primée.
Slow Horses déploie ses personnages attachants – des loufoques affectés par la vie – dans des situations extravagamment comiques qui apportent une légèreté qui rafraîchit le genre rigide de la série d’espionnage. La scène où River est contraint de subir le processus humiliant de création d’un badge visiteur lorsqu’il doit exceptionnellement se rendre au siège du véritable MI5 à Londres, loin des bureaux délabrés de la Slough House, est particulièrement hilarante.
Un duel magistral
Le personnage clé qui catalyse l’aspect comique de la série est sans conteste Gary Oldman, qui s’amuse royalement en tourmentant ses collègues, les traitant de « fuckups » (néerlandais) avec un accent britannique à couper au couteau. Le fait de le voir ici est en soi un événement majeur car il n’avait pas apparu à la télévision pendant deux décennies presque.
Kristin Scott Thomas, également, est marquante en tant que numéro 2 intimidante et légèrement suspecte du MI5, et son affrontement avec Gary Oldman est saisissant. Cette prestation brillante émane de tout le casting : outre Jack Lowden (Dunkerque), on retrouve notamment Olivia Cooke (House of the Dragon) et Jonathan Pryce (The Crown).
Pour couronner le tout, Mick Jagger himself prête sa voix pour l’ouverture de la série. L’attente sera longue car Slow Horses prévoit en tout quatre saisons pour couvrir toute la saga littéraire de Mick Herron. Déjà diffusée, la deuxième saison nous ramène à l’époque de la guerre froide, quand le personnage de Gary Oldman était encore un brillant agent secret. Et elle surpasse même la première.
Slow Horses, une série Apple TV+, est disponible sur CANAL+ à partir du 24 août.
Les deux premières saisons sont disponibles sur myCANAL.