Le troisième long métrage d’Ari Aster (Hereditary, Midsommar) suit Joaquin Phoenix dans le rôle d’un homme dont la vie a été empêchée par sa mère. Beau Is Afraid est un film épique, grotesque et fascinant qui pourrait diviser les spectateurs.
Le syndrome du jeune auteur américain
Les jeunes auteurs américains ont souvent tendance à se prendre pour de grands réalisateurs dès leur premier succès. On peut citer Damien Chazelle (Whiplash, La La Land) ou Robert Eggers (The Witch, The Lighthouse) qui ont tenté de relever le défi. Ari Aster, le réalisateur de Hereditary et Midsommar, ne fait pas exception. Avec Beau Is Afraid, il nous offre un film de trois heures, sorte de longue psychanalyse fantasmagorique. Le film pourrait sembler prétentieux à certains, mais il montre une ambition rassurante dans un monde où le cinéma est de plus en plus standardisé.
Une odyssée œdipienne
Beau Wassermann (Joaquin Phoenix) est un homme bientôt quinquagénaire, solitaire et en analyse. Sa vie a toujours été minée par la peur, qui est en grande partie causée par sa mère. Pour l’anniversaire du décès de son père, il se prépare à rejoindre sa mère mais une série de hasards malheureux lui fait manquer l’avion. Sur ce, il reçoit la nouvelle de la mort de sa mère! Chassé de son appartement par des sans-abri, Beau finira quand même par partir pour une sorte de road-trip involontaire. Il passera d’abord dans une famille “normale”, puis dans une commune. Enfin, au terme d’une mise en abyme théâtrale qui lui fait entrevoir une vie alternative (dans laquelle il serait devenu père avant d’errer par le vaste monde), il arrive à la maison de sa mère pour affronter la source de tous ses malheurs…
Paradoxale culpabilité juive
Beau Is Afraid reprend le cliché de la mère juive surprotectrice et culpabilisante, doublée ici d’une self-made woman moderne, gonflé jusqu’à des proportions “ultimes”. La difficulté est bien sûr d’entrer dans un tel imaginaire, mi-comique mi-horrifique, qui passe sans transition d’une naissance filmée du point de vue du bébé à l’adulte phobique de tout, pour finir, après bien des détours, par un coït fatal, un retour au terrifiant grenier de son enfance et un procès-spectacle cosmique.
Beau Is Afraid est un film ambitieux qui pourrait diviser les spectateurs. Si certains pourront être rebutés par sa prétention, d’autres admireront la qualité de sa mise en scène et de son univers.